L'effet miroir dans la relation client (étude Les Français et les services)

La Fête des services 2013 est une première. Il s'agissait de réunir les professionnels du service et récompenser des entreprises innovantes dans le domaine en France (relire mon billet au sujet du lancement de cet événement). Ce fut un succès : 276 candidatures reçues, départagées par un jury et 18.000 votes, ont donné le palmarès suivant :

  • Catégorie « Améliorer la vie quotidienne » :  Holidog
  • Catégorie « Services des acteurs publics » : Beecitiz
  • Catégorie « Services qui rapprochent les Français » : Short-Edition
  • Catégorie « Services aux Seniors » : Seniors à votre service
  • Catégorie « Services innovants et créatifs » : Blablacar
  • Grand Prix Esprit de Service France : Allo-mairie
A l'occasion de cette fête, l'Académie du service, qui en était le partenaire, a publié une étude inédite sur les Français et les services (suivre ce lien pour la recevoir en intégralité, elle a été réalisée par INIT). Voilà ce que j'en retiens :

La relation client est le quotidien d'un Français sur deux. 
Pour la première fois une étude s’intéresse à la satisfaction des consommateurs de service sur les attitudes de service, et à l’opinion des "producteurs de service", c'est à dire les Français au contact du client.
On y apprend qu'un Français sur deux est en contact avec le public (49,5% des Français précisément), et travaille en contact avec des clients, des usagers ou des patients. Parmi eux, 55% s’adressent à des particuliers, 11% à des entreprises et 34% aux clients particuliers ou professionnels. 57% des Français en contact avec le public y passent plus de la moitié de leur temps (et pour 17% passent plus de 90%).
On peut dire que pour un quart des Français, c'est au moins la moitié du temps de travail, de quoi améliorer chaque jour ses capacités relationnelles. D'autant que les Français ont besoin de proximité, veulent qu'on s'occupe d'eux : ce sont les professionnels du secteur « Commerces et services de proximité » qui recueillent les meilleures notes (83%), devant le secteur des Loisirs (80%) et de la Beauté/bien-être (79%).
Le constat sur la qualité du service rendu est plus sévère : seuls 5.2% sont « tout à fait satisfaits » par les services rendus par les entreprises en France et plus de la moitié (58%) des Français estiment que la qualité des services s’est dégradée ou « beaucoup dégradée » ces trois dernières années : autant de chiffres qui prouvent l'intérêt d'une mobilisation nationale et de manifestations telles que la Fête des services !
Moins de la moitié des personnes interrogées (46%) pensent que les Français ont « la culture du service » mais, pour apporter une touche d'espoir, 9 Français sur 10 estiment que les métiers de service sont porteurs d’avenir.
Miroir, miroir, pourquoi tant de sociétés ne te regardent pas ? 
Les personnes en contact avec le public, en tant que collaborateur ou professionnel, estiment à 89% que « la résolution du problème de nos clients est une priorité », « le respect des engagements est au cœur de notre conception du service » et que « le service est une valeur fondamentale de mon entreprise ». Les personnes qui opèrent chaque jour la relation client ont la volonté de bien faire, mais sont-ils bien traités ? Le plus mauvais score d’agrément sur 11 points relatifs aux postures de service pour les collaborateurs, avec 13 points de moins de taux d’accord, est : « la satisfaction des salariés est aussi importante que celle des clients », illustration des progrès à faire dans la "symétrie des attentions" (un concept théorisé par l'Académie du service), d'où mon angle d'analyse sur l'effet miroir. Combien de sociétés mesurent la satisfaction des collaborateurs et mettent en miroir celle des clients ? Relisez la très intéressante interview du Directeur Relation Client de l'année 2012 sur mon blog, Eric Lestanguet de GDF Suez, un adepte de "l'effet miroir";

Désobéir pour satisfaire les clients et les employés !
L'étude "Les Français et les services" indique clairement les sources d’amélioration dans les attitudes de service et la relation client. Le meilleur score des personnes qui leur rendent des services est la « compétence » avec 70% d’accord, suivie de l’amabilité et du sourire puis de «la confiance dans ce professionnel» (auquel j'ai affaire). Deuxième plus mauvais score pour les Français, en avant dernière position, se trouve la réponse à la proposition suivante : « Avec eux, je n’ai pas à faire des efforts pour que mes problèmes soient résolus. » Ce résultat vient en résonance avec le récent Baromètre de l'effort client publié par l'AFRC et dont j'ai fait la chronique sur mon blog. On y apprenait que 35% des Français reconnaissaient devoir faire un effort faible ou important dans la moyenne des parcours client étudiés.
On découvre en outre que le principal reproche des Français (plus mauvais score de l'étude) est la faible capacité des personnes produisant des services à être capable de «s’affranchir des règles pour satisfaire le client» (seuls 51% des Français d’accord avec ce point, plus faible score parmi 13 attitudes de service). En gros, il faut comprendre qu'on gagnerait des points de satisfaction client si on permettait aux collaborateurs de faire preuve de davantage de souplesse et d'être capable de désobéir. A ce propos, j'apprends en lisant le numéro de janvier 2014 de Management, de la bouche d'Isabelle Barth, Directrice de l'EM Strasbourg : "On constate dans nos études que les employés avec le plus fort taux de satisfaction sont ceux qui désobéissent aux consignes. Par exemple, en consacrant plus de temps que recommandé à une personne pour résoudre son problème."
On ne dit rien d'autre chez Zappos aux Etats-Unis et chez HCLT en Inde, deux exemples d'entreprises dont j'ai déjà beaucoup parlé sur mon blog...

L'effet miroir, la mesure de la symétrie des attentions, est certainement l'enjeu essentiel de la relation client.
En agissant sur le bien-être des collaborateurs, en améliorant leurs conditions de travail, leurs aptitudes (lire mon billet sur la symétrie des équipements), on fait le pari d'une relation client humaine et harmonieuse où le contact client n'est plus synonyme de stress mais d'occasion de faire la différence d'une part, et, d'autre part, on se prépare à l'arrivée des nouvelles générations (dites "génération Y", "millenials", "Z" ou ce que vous voulez pour qualifier les plus jeunes, moins impliqués, plus exigeants sur la qualité de vie au travail).
Si vous manquez d'idées cadeaux de dernière minute pour Noël, offrez "Servir ou disparaître" ou "Les employés d'abord, les clients ensuite", votre relation client sentira moins le sapin.